La nourriture au pensionnat
Lors d’un souper officiel dans le cadre des festivités du 100e anniversaire de fondation du Séminaire de Rimouski en mai 1963, M. Gérard Filion, journaliste invité, directeur du Devoir et ancien du Séminaire, a tenu à rafraîchir la mémoire des administrateurs du Collège et des officiels présents dont son Éminence le cardinal Maurice Roy, archevêque du diocèse de Québec et son Excellence Mgr Charles-Eugène Parent, archevêque du diocèse de Rimouski, concernant certaines us et coutumes du Séminaire. Voici une anecdote rapportée par des témoins présents au souper qui ont vu l’orateur, M. Gérard Filion, se tourner vers Mgr Parent et dire :
« Tous les anciens pensionnaires du Séminaire se souviennent très bien que la direction du Séminaire se préoccupait davantage de la nourriture spirituelle des élèves que de leur nourriture terrestre. »
Ce qui ne manqua pas de susciter l’hilarité des officiels présents au souper et de tous les anciens. Pour appuyer ces dires, voici le texte intégral d’une lettre adressée aux parents des séminaristes par le Directeur, l’abbé Pascal Parent, quelque cinq années auparavant:
Séminaire de Rimouski
23 octobre 1958
Chers parents,
Vous nous avez confié votre fils depuis près de deux mois; nous sommes fiers de la confiance que vous nous accordez et nous espérons que le bulletin vous satisfera. Pour réussir en éducations (sic), vous le savez, il faut la collaboration étroite des parents et des maîtres; confiants donc que cette collaboration nous est assurée, nous nous adressons à vous afin de nous aider à faire cesser un abus très grave.
Que la nourriture de la cuisine du Séminaire ne soit pas aussi savoureuse que celle de votre cuisine, nous ne l’ignorons pas. Que des élèves aient des fruits et quelques légères sucreries dans leur vestiaire pour manger à l’occasion, nous l’admettons. Mais que des élèves aient des épiceries très bien garnies dans leur vestiaire, nous croyons que ce n’est pas normal. Plusieurs ont non seulement des gâteaux, bonbons et biscuits assortis, mais tous les genres de beurre, des confitures, des conserves de fruits, des conserves de tous les produits imaginables.
Comment peuvent-ils trouver la nourriture du Séminaire bonne, lorsqu’ils se rendent d’abord au vestiaire, mangent ces nourritures sucrées et vont ensuite au réfectoire ? Nous connaissons plusieurs jeunes qui se sont ainsi brisé l’estomac pour la vie. Cela détruit surtout l’esprit de mortification et de renoncement, en les rendant inaptes à répondre généreusement à l’appel de Dieu. C’est surtout pour cette raison que nous vous demandons de ne pas vous rendre à toutes les demandes de votre fils dans ce genre : il y a souvent caprice et beaucoup de vanité vis-à-vis de ses confrères.
Espérant que vous comprendrez l’importance de notre demande et que vous collaborerez nous demeurons vos tout dévoués.
Pascal Parent, ptre directeur.