Contes et anecdotes

Le vieux hangar

Alors que j’avais une douzaine d’années et que ma jeune soeur Denise en avait 10 ou 11, l’idée lui vint d’ouvrir un théâtre avec ses amies. Près de la maison, il y avait un hangar pour ranger le bogey, la voiture à lait (car nous étions laitier) et diverses autres « vieilleries ». Durant de nombreuses années mon père avait utilisé le deuxième étage de ce hangar pour engranger des céréales (avoine, blé ou orge) en vrac. Depuis peu, ce 2ème étage n’était plus utilisé. Dans le pignon, il y avait des poutrelles soutenant un faux plancher pour ranger de vieux outillages.

L’occasion était belle pour que ma soeur cadette et ses amies transforment cet ancien fenil en théâtre. Durant deux jours elles s’affairèrent à nettoyer, enlever les fils d’araignées, balayer, poser des rideaux dans les chassis, bref à rendre ça habitable par d’autres mammifères que les souris! Çela finit par devenir propre et accueillant. L’idée était de monter des pièces de théâtre et de charger un sou d’entrée pour les adultes. Mon frère ainé et moi avions été impliqués dans le coup. Mon ainé fut nommé curé et moi vicaire. Ma jeune soeur Denise devint supérieure générale et ses amies de simples religieuses.

Le jour dit, ce fut porte ouverte ! Les religieuses portaient chacune un essuie-vaisselle ou un torchon sur la tête en guise de voile. Le curé étant un personnage plutôt contestataire et atypique, il ne portait pas de soutane; le vicaire devait porter une jaquette en guise de soutane. Avant d’entrer au couvent, les religieuses devaient d’abord se préparer à faire une confession générale. Le vicaire était chargé d’intervenir pour la confession seulement après que la supérieure ait fait son propre examen de conscience à genou sur un prie-Dieu. Pour mieux observer la scène et peut-être pour s’assurer discrètement que le vicaire fasse bien sa job, le curé (mon frère) avait grimpé sur les poutrelles où étaient entreposés divers objets abandonnés par mes parents, à l’aide d’une échelle. Alors que la supérieure générale était entrée dans une profonde méditation sur ses péchés, VLAN ! Un vieux rouet abandonné par ma mère lui tomba sur la tête et elle perdit connaissance. C’est alors que ma mère accourut pour la réanimer et lui prodiguer les premiers soins. Fort heureusement ce fut sans gravité. Pendant ce temps, le vicaire ramassa le vieux balai à sa portée et se mit à la poursuite du curé en vociférant et criant « Mon maudit curé, tu vas descendre de là !». Étant plus frêle que mon frère, je ne réussis pas à le faire descendre, mais quand mon père arriva sur les lieux, il prit la poudre d’escampette !

Par la suite, plus aucun curé ni vicaire ne vinrent perturber le couvent !

8 janvier 2017

Publié par 503rg3ou dans Contes et anecdotes