Vie tumultueuse d’Anselme Lévesque, père

Pour rendre justice à cet ancêtre, il faudrait lui consacrer un très long chapitre. On pourrait presque lui élever un monument tant il fut remarquable par sa stature, son courage, sa persévérance, son audace, sa générosité et sans doute aussi par ses qualités humaines. Cela nous fair regretter de ne pas l’avoir connu ou côtoyé. Voyons donc ces faits marquants qui justifient tout le mérite qu’on lui attribue.

  1. En compagnie de Françoise Vincent-Doiron, sa première épouse d’origine acadienne, il élève une famille de 14 enfants ; ce qui n’était pas rare à cette époque. Encore fallait-il en avoir la capacité physique et financière. Il ne faut surtout pas oublier que c’est Françoise qui dût porter ces 14 enfants. Nul doute qu’Anselme et sa famille ont vécu pauvrement. Tous ces enfants sont nés à Rivière-Ouelle, durant la période 1775-1792.

  2. De ces 14 enfants, 7 sont décédés à la naissance ou en bas âge, sans compter Noël, le fils ainé, qui décéda à 19 ans. Donc seulement 6 enfants ont survécu! Peut-on imaginer les souffrances et les déceptions que les parents ont dû endurer, en voyant disparaître plus de la moitié de leurs enfants avant même qu’ils puissent goûter à la vie. Trouverions-nous le courage de subir autant d’épreuves aujourd’hui ?

  3. En 1803, Anselme est encore affligé par le deuil de son épouse Françoise Vincent, à peine âgée de 50 ans. Son décès est survenu le 15 juillet 1803, à Saint-Grégoire de Nicolet. On se demande bien par quel hasard Anselme et sa famille s’est retrouvé à Saint-Grégoire ? Une première explication pourrait être que l’on retrouvait beaucoup d’Acadiens à cet endroit et que Françoise était acadienne. Fille de François Vincent, elle était née à Pisiguit en 1753. Son père a dû fuir la déportation acadienne de 1755 alors qu’elle n’avait que 2 ou 3 ans. Peut-être a-t-elle voulu se rapprocher de sa communauté. Peut-être la famille Lévesque a-t-elle voulu fuir Rivière-Ouelle, leur village natal où sévissaient tant de maladies infantiles ou contagieuses et qui devait leur rappeler trop de mauvais souvenirs.

  4. A peine remis du deuil de sa première épouse, le 16 janvier 1804, Anselme se remarie avec une autre acadienne! Lui-même âgé de 51 ans, il épouse Marguerite Comeau, fille mineure de Jean-Baptiste Comeau et de Marie-Josephe Houde (on trouve aussi le nom de Boucher dans certains registres s’agissant alors de sa deuxième épouse). Marguerite n’a alors que 17 ans et Jean-Isaie, le fils ainé d’Anselme, n’a que 11 ans. Nul doute qu’elle devait avoir beaucoup de maturité et de pourvoir d’attraction pour qu’Anselme jette son dévolu sur elle aussi rapidement. Mais il avait besoin d’une mère pour venir en aide à ses enfants qui grandissaient. On peut présumer en tout cas que les acadiennes étaient des filles très courageuses et attachantes, à moins qu’Anselme lui-même jouât le rôle de grand séducteur? Ce n’est sûrement pas le courage qui fit défaut à Anselme puisqu’il eut encore 8 enfants avec Marguerite Comeau. Cette fois il fut récompensé pour sa persévérance, puisque Dieu leur laissa 7 beaux enfants en pleine santé, dont 6 garçons que l’on retrouvera plus tard à Rimouski. Ils sont tous nés à Saint-Grégoire, mais on sait maintenant qu’Anselme est retourné vivre à Rivière-Ouelle vers 1815. En effet, le 8 octobre 1814, au mariage de son fils Michel (fils de Françoise Vincent) à Rivière-Ouelle, il est dit résidant de St-Grégoire. Il y aura donc séjourné durant une quinzaine d’années. Les dates ne sont pas précises.

  5. Anselme retourna vivre à Rivière-Ouelle durant une bonne dizaine d’années, entre 1815 et 1825 approximativement, puisqu’on le retrouve à cet endroit, le 5 mai 1823, pour le second mariage mariage de son fils Anselme avec Marguerite Dumont. D’ailleurs d’autres documents notariés attestent sa présence à Rivière-Ouelle durant cette période (le 14 mars 1826, il échange une terre avec son neveu Pierre Lévesque.

  1. Finalement, c’est à Rimouski qu’Anselme vint finir ses jours, toujours accompagné de sa deuxième épouse Marguerite Comeau et de ses fils Michel (premier lit), Etienne, Hubert, Joseph, Félix, Pierre. et Julie, ces derniers du deuxième lit. Il y résida à compter de 1825, jusqu’à son décès survenu le 23 mars 1833. Le 24 janvier 1825, son fils Etienne a signé un contrat d’engagement avec Samuel Bradley, maitre entrepreneur de bois, comme travailleur forestier le long de la rivière Rimouski., de même que le 27 avril 1829 avec William Price & Cie, ainsi que le 9 mars 1831, avec Michel Larivé marchand de bois. Ce même Etienne Lévesque semble avoir fait souche à Rimouski puisque Genevieve, sa fille cadette, s’est mariée à Baie-des-Sables, le 24 février 1868, avec Théodore Gagné. Le 11 mars 1825, son fils Michel fait baptiser son 2ième fils à St-Germain. Même si Anselme père est toujours présent à Rivière-Ouelle le 4 avril 1825 alors qu’il vend son emplacement à Augustin Ouellet, on peut présumer que ses fils l’ont précédé légèrement à Rimouski et qu’il est venu les rejoindre au cours de l’été 1826. Il semble qu’Hubert et Joseph aient quitté Rimouski après 1834, alors que Félix et Pierre se sont installés définitivement, le premier à Rimouski et l’autre à Bic. Qu’est-il advenu de la veuve Marguerite Comeau après le décès d’Anselme ? Difficile de le dire puisque l’on n’a pas retrouvé son acte de décès à ce jour. Une certitude cependant… elle est décédée avant le 27 avril 1841, jour du mariage de Félix Lévesque  « garçon majeur de défunt Anselme Lévêque & de défunte Marguerite Comeau de cette paroisse…  » avec Vitaline Bélanger.

  2. Pour résumer, on retiendra que notre ancêtre Anselme Lévesque a vécu deux fois, et ce d’une manière très intense et productive. Il a fait preuve de courage dans toutes les épreuves qui ont jalonné sa vie, et de ténacité pour affronter les difficultés. Il fut fort bien récompensé par la très grande progéniture qu’il nous a laissée et qui honore aujourd’hui sa mémoire, non seulement ici au Québec, spécialement dans la région du Bas-St-Laurent, mais aussi aux USA où plusieurs de ses descendants ont fait souche.